Portraits : Cauchemar ou réalité - Les Impatients

Portraits : Cauchemar ou réalité

Portraits est un projet narratif, en mots et en photos, imaginé et mis en œuvre par Laura Regev, responsable d’ateliers.

Il s’agit de présenter au public les histoires familières, histoires habituellement partagées dans l’atmosphère de confidences des ateliers.

Au cours d’une conversation avec Laura, la personne portraitisée arrête son choix sur une histoire, la raconte et choisit comment elle y sera représentée en image. Avec un appareil photographique
des années 50 et un film de 12 photos, la personne fait son autoportrait.

En réponse au texte, à l’image choisie et à la conversation qui a amorcé le processus, Laura capte à son tour un portrait.

 

Cauchemar ou réalité, par Michel

Michel, autoportrait

 

Passé d’infirmier « volant » à patient itinérant… Regarder l’autre côté du comptoir, ça me fait encore peur. Qui suis-je? Je ne sais plus?

 

Michel, par Laura Regev

 

« Code blanc, code blanc.
Unité de psychiatrie — 8e — Poste des Infirmières.

Oh! Michel vient d’être projeté au plancher. On dirait un planeur volant à 3′ du sol. »

Mon atterrissage ne se fait pas sans heurts. Face contre terre, le bras droit devant moi. Inconscience ou période d’absence je ne sais pas. Mon assaillant continue de me chevaucher, m’étrangle en me criant : « J’va te tuer mon hostie t’es mort. »
Il a ses deux bras autour de mon cou, heureusement mon bras droit longe mon corps et l’empêche de me tuer, mes seuls mouvements sont produits par mon assaillant, je ressemble à une poupée de chiffon disent mes consœurs.
Fait cocasse : seules les infirmières sont venues à ma rescousse, en tentant de lui donner des coups de pied, criant de me laisser, ce qui ne change rien. Quelques minutes plus tard un préposé mâle est venu me libérer.
Le temps de reprendre mes sens, je me rends dans une pièce, seul, assis par terre, à pleurer,
on m’achemine à l’urgence avec un diagnostic de « trauma aigu ». Six semaines plus tard,
stress post-traumatique, psychologue, 1 fois semaine pendant 2 ans, psychiatre aux 6 semaines,
3 ans plus tard on peut parler de stress post-traumatique chronique, visite chez le psychiatre
aux 6 semaines, idéations suicidaires, flash-back, hallucinations, périodes de fatigue, perte d’énergie ou plutôt un ralentissement. 13 pilules par jour, fracture de ma vie. Heureusement qu’il y a l’art-thérapie pour me changer les idées.